Le gouvernement du Québec a dévoilé sa politique bioalimentaire Nourrir nos ambitions 2025-2035. Il y a certes des avancées dans cette politique, mais au-delà de l’opération de relations publiques, cela va prendre un redressement majeur dans la santé économique des entreprises pour qu’elles puissent continuer de se développer.
Selon les prévisions d’Agriculture et Agroalimentaire Canada, les entre-prises agricoles du Québec auront un revenu net négatif de 129 millions de dollars (M$) cette année. Derrière ces chiffres, des familles voient leur revenu net s’évaporer.
Pourtant, le ministre André Lamontagne vise des investissements de 25 milliards de dollars d’ici 10 ans dans l’agroalimentaire, notamment sur les fermes du Québec. Mais comment investir quand elles perdent de l’argent? Lors de la précédente politique bioalimentaire, l’essentiel des investissements provenait de l’endettement. Cet endettement pèse aujourd’hui lourdement et explique en partie l’impasse actuelle.
C’est sans compter que nous avons une agriculture hypernormée, ce qui affecte notre compétitivité face à nos concurrents. Alors, les programmes et les budgets dédiés à l’agriculture doivent être à la hauteur, ce qui n’est pas le cas actuellement. Depuis 2001, les gouvernements à travers le monde consacrent en moyenne plus de 1,5 % de leurs dépenses à leur agriculture (2,1 % en 2022). Au Québec et au Canada, ce chiffre est inférieur à 1 %.
Dans l’industrie agroalimentaire, tout part de la base, soit des producteurs. Or, l’argent ne descend pas suffisamment jusqu’à la base de la pyramide. Les grands transformateurs et distributeurs font des profits records pendant que les producteurs et productrices sont en déficit. Voilà à quoi devrait s’attaquer une véritable politique bioalimentaire : permettre à la base de bien vivre afin d’attirer une relève dynamique pour développer des terres et ainsi avoir une meilleure résilience alimentaire.
Nourrir les gens devrait d’ailleurs être considéré comme un intérêt de sécurité nationale et ne pas être traité comme le commerce des meubles ou des fers à friser dans les ententes internationales.
Une des phrases de la politique bioalimentaire m’a particulièrement inquiété. Elle mentionne qu’un des objectifs est d’obtenir « Zéro perte nette de territoire agricole à bon potentiel ».
Pourtant, tous les sols peuvent avoir un bon potentiel selon la production et les techniques utilisées. En tant que producteurs agricoles en Abitibi-Témiscamingue, nous savons que nos terres ont un immense potentiel, surtout dans un contexte de changements climatiques et d’une meilleure compréhension pour pouvoir en retirer le maximum grâce à la recherche.
Notre récente visite dans le nord de l’Ontario, qui est exactement à la même latitude que notre région, démontre qu’il est possible de défricher des terres et d’augmenter la production. Il ne faut que de la volonté et de l’ambition, deux qualités qui devraient transpirer dans toute bonne politique bioalimentaire.
Merci à tous et toutes!